Prestation compensatoire, prescription de l’exécution forcée et saisie immobilière
juillet 4, 2025 2:08 pmPrestation compensatoire, prescription de l’exécution forcée et saisie immobilière
Par un arrêt du 20 février 2025, la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a confirmé un jugement du 13 juin 2024 dans lequel le Juge de l’Exécution du service des saisies immobilières a retenu la prescription de l’exécution forcée d’un jugement homologuant une convention de divorce auquel il avait été acquiescé le même jour.
La reconnaissance de la prescription de l’exécution forcée a eu pour conséquence que :
- La déclaration de la nullité du commandement de payer valant saisie immobilière du bien immobilier,
- La radiation du commandement de payer valant saisie au service de la publicité foncière concerné.
L’apport de la jurisprudence et l’audience d’orientation
L’apport du jugement du 13 juin 2024 et de son arrêt confirmatif du 20 février 2025, procédures dans lesquelles le cabinet est intervenu en défense et a permis qu’il soit relevé la prescription de l’exécution forcée du titre exécutoire est de deux ordres :

1. D’une part, dans une procédure en saisie immobilière, il est primordial de soulever les irrecevabilités à l’audience d’orientation.
Il s’agit d’une application de l’article R322-15 du code de procédure civile d’exécution lequel dispose que :
« A l’audience d’orientation, le juge de l’exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.
Lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur. »
2. D’autre part, l’application de la notion de prescription de l’exécution forcée
Dans ce dossier, il a été fait une stricte application de l’article L111-4 du code des procédures civiles d’exécution. La motivation retenue sera la suivante :
Dans le Jugement du 13 juin 2024
« Il est constant que les jugements mêmes passés en force de chose jugée, ne peuvent être exécutées contre ceux auxquels sont opposés qu’après leur avoir été régulièrement notifiés, à moins que l’exécution ne soit volontaire.
Il est non moins constant en l’espèce à compter du XXXXX, que le jugement de divorce contradictoire auquel les parties ont acquiescé constitue un titre exécutoire ayant acquis force de chose jugée parfaite à acquiescement ; Y disposait donc d’un délai de 10 ans pour le mettre à exécution soit jusqu’au XXX, que la signification indispensable pour procéder à son exécution forcée, en application de l’article 503 du code de procédure civile, est tardive ayant été opérée 12 ans après son acquiescement.
L’acte d’acquiescement emporte soumission au jugement et par voie de conséquence son acceptation et la reconnaissance de son autorité.
L’arrêt de la 2e chambre de la Cour de cassation du 5 octobre 2023, n°20-23.523, cité et analysé par le créancier poursuivant, ne remet pas en cause les conséquences d’un acte d’acquiescement.
Dans l’espèce, l’arrêt fondant la procédure d’exécution forcée, daté du 29 mai 2007, n’est pas fait l’objet d’un acte d’acquiescement.
En conséquence de quoi, seule la signification du titre exécutoire a permis de faire courir le délai pour former un pourvoi en cassation et ainsi lui confère force exécutoire.
Cette signification du jugement en l’espèce ainsi que la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière, qui constituent certes des actes d’exécution forcée ne sauraient interrompre le délai de prescription de 10 ans, expiré à leur date. »
Confirmation par l’arrêt du 20 février 2025
« Selon l’article L.111-4 du même code l’exécution de ces titres exécutoires ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long ;
Il est jugé que le point de départ de ce délai décennal court à compter du jour où le jugement a acquis force exécutoire (2e Civ., 5 octobre 2023, pourvoi n° 20-23.523) ;
Cette force exécutoire s’attache à la décision de justice qui n’est pas susceptible de recours suspensif d’exécution et qui, revêtue de la formule exécutoire, a été notifiée au débiteur à moins que l’exécution n’en soit volontaire conformément aux dispositions de l’article 503 du code de procédure civile ;
En l’espèce les deux parties ont acquiescé au jugement de divorce du XXXXX le jour de son prononcé, et en vertu de l’article 409 dudit code l’acquiescement « emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours » renonciation rappelée aux actes d’acquiescement qui mentionnent que le jugement est considéré par chacun des signataires « comme définitif et ayant autorité de la chose jugée » ;
Par ailleurs il n’est pas discuté que ce jugement qui a caractère exécutoire en application de l’article 504 du code de procédure civile, a été revêtu de la formule exécutoire ;
Enfin il a été volontairement exécuté par les parties puisqu’il n’est pas discuté qu’il a fait l’objet d’une transcription sur les actes d’état civil et que la convention homologuée a été exécutée excepté sur le versement de la prestation compensatoire stipulée payable dans un délai maximum de neuf ans à compter du prononcé du divorce ;
Cette exécution volontaire du jugement dispensait donc les parties de le notifier ;
Ainsi qu’exactement retenu par le premier juge Y disposait en conséquence d’un délai de dix ans à compter du prononcé de ce jugement qui avait force exécutoire, pour le mettre en exécution, ce qu’elle n’a pas fait et alors même que le délai maximum dans lequel la prestation compensatoire devait être réglée par X était expiré depuis le XXXX, sans qu’aucun acte interruptif de prescription n’est été accompli avant ou après cette date ;
Et y disposait à l’issue de ce délai de neuf années, dont elle prétend qu’il constituait un obstacle à son action, du temps nécessaire pour agir avant l’expiration du délai décennal de prescription ; (…) ;
C’est en conséquence à bon droit que le premier juge a fait droit à la fin de non recevoir tirée de la prescription, soulevée par X. »